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CORINNE OU L’ITALIE.

terraine fait bouillonner, sont les fleuves de cet enfer visité par Énée.

Le feu, cette vie dévorante qui crée le monde et le consume, épouvantait d’autant plus que ses lois étaient moins connues. La nature jadis ne révélait ses secrets qu’à la poésie.

La ville de Cumes, l’antre de la Sibylle, le temple d’Apollon, étaient sur cette hauteur. Voici le bois où fut cueilli le rameau d’or. La terre de l’Énéide vous entoure, et les fictions consacrées par le génie sont devenues des souvenirs dont on cherche encore les traces.

Un Triton a plongé dans ces flots le Troyen téméraire qui osa défier les divinités de la mer par ses chants : ces rochers creux et sonores sont tels que Virgile les a décrits. L’imagination est fidèle, quand elle est toute-puissante, Le génie de l’homme est créateur, quand il sent la nature, imitateur, quand il croit l’inventer.

Au milieu de ces masses terribles, vieux témoins de la création, l’on voit une montagne nouvelle que le volcan a fait naître. Ici la terre est orageuse comme la mer, et ne rentre pas comme elle paisiblement dans ses bornes.