Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome II, 1807.djvu/216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
212
CORINNE OU L’ITALIE.

qu’elle lui faisait, et par la généreuse imprudence de son cœur, tandis qu’Oswald, responsable du sort d’une autre, prenait à chaque instant de nouveaux liens, sans acquérir la possibilité de s’y abandonner, et ne pouvait jouir ni de son amour ni de sa conscience, puisqu’il ne sentait l’un et l’autre que par leurs combats.

Au moment où tous les amis de Corinne prirent congé d’elle, ils recommandèrent avec instance son bonheur à lord Nelvil. Ils le félicitèrent d’être aimé par la femme la plus distinguée, et ce fut encore une peine pour Oswald, que le reproche secret que semblaient contenir ces félicitations. Corinne le sentit, et abrégea ces témoignages d’amitié, tout aimables qu’ils étaient. Cependant quand ses amis, qui se retournaient de distance en distance pour la saluer encore, furent disparus à ses yeux, elle dit à lord Nelvil seulement ces mots : — Oswald, je n’ai plus d’autre ami que vous. — Oh comme dans ce moment il se sentait le besoin de lui jurer qu’il serait son époux ! Il fut prêt à le faire ; mais quand on a souffert long-temps, une invincible défiance empêche de se livrer à ses premiers mouvemens, et tous les partis irrévocables font trembler, alors même que le cœur les ap-