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CORINNE OU L’ITALIE.


CHAPITRE II.


IL y a quelquefois dans la destinée un jeu bizarre et cruel ; on dirait qu’elle est une puissance qui veut inspirer la crainte, et repousse la familiarité confiante, souvent, quand on se livre le plus à l’espérance, et surtout lorsqu’on a l’air de plaisanter avec le sort, et de compter sur le bonheur, il se passe quelque chose de redoutable dans le tissu de notre histoire, et les fatales sœurs viennent y mêler leur fil noir, et brouiller l’œuvre de nos mains.

C’était le dix-sept de novembre que Corinne s’éveilla tout enchantée de jouer le soir la comédie. Elle choisit, pour paraître dans le premier acte en sauvage, un vêtement très-pittoresque. Ses cheveux, qui devaient être épars, étaient pourtant arrangés avec un soin qui montrait un vif désir de plaire, et son habit élégant, léger et fantasque, donnait à sa noble figure un caractère de coquetterie et de malice singulièrement gracieux. Elle arriva dans le palais où la comédie