Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 2.djvu/346

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hommes, et je leur déclarai qu’on avait dessein de se saisir du navire pour nous traiter comme des pirates ; puis je leur demandai s’ils voulaient nous assister et se défendre. Ils répondirent joyeusement, unanimement, qu’ils voulaient vivre et mourir avec nous. Sur ce, je demandai au capitaine quel était à son sens la meilleure marche à suivre dans le combat, car j’étais résolu à résister jusqu’à la dernière goutte de mon sang. — « Il faut, dit-il, tenir l’ennemi à distance avec notre canon, aussi long-temps que possible, puis faire pleuvoir sur lui notre mousqueterie pour l’empêcher de nous aborder ; puis, ces ressources épuisées, se retirer dans nos quartiers ; peut-être n’auront-ils point d’instruments pour briser nos cloisons et ne pourront-ils pénétrer jusqu’à nous. »

Là-dessus notre canonnier reçut l’ordre de transporter deux pièces à la timonerie, pour balayer le pont de l’avant à l’arrière, et de les charger de balles, de morceaux de ferraille, et de tout ce qui tomberait sous la main. Tandis que nous nous préparions au combat, nous gagnions toujours le large avec assez de vent, et nous appercevions dans l’éloignement les embarcations, les cinq grandes chaloupes qui nous suivaient avec toute la voile qu’elles pouvaient faire.

Deux de ces chaloupes, qu’à l’aide de nos longues-vues nous reconnûmes pour anglaises, avaient dépassé les autres de près de deux lieues, et gagnaient considérablement sur nous ; à n’en pas douter, elles voulaient nous joindre ; nous tirâmes donc un coup de canon à poudre pour leur intimer l’ordre de mettre en panne et nous arborâmes un pavillon blanc, comme pour demander à parlementer ; mais elles continuèrent de forcer de voiles jusqu’à ce qu’elles vinssent à portée de canon. Alors nous amenâmes le pavil-