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Au moment de sa mort, M. de Thiézac, averti depuis quelque temps de sa maladie, était venu revoir Ernest, lui offrir ses services, ses conseils, pour les affaires de la succession de son oncle, dont la raison était tout à fait altérée. Sensible à cette marque d’intérêt, Ernest avait accepté ces offres avec reconnaissance, et il s’établit entre ces deux hommes des relations d’amitié sincère.

Le vieux M. de Liron mourut peu de jours après sa fille. Par son testament, dont il était facile de s’apercevoir que mademoiselle Justine de Liron avait dirigé l’esprit et arrêté même les détails, il faisait Ernest de P*** son héritier.

M. de Thiézac ne borna pas les marques de l’attachement que lui avait inspiré Ernest aux soins qu’il prit de l’éclairer et de l’aider pour mettre toutes ses affaires de succession en règle. Il avait encore eu l’attention délicate d’écrire à M. N***, le ministre des relations extérieures à Paris, pour le prévenir des malheurs qu’Ernest avait éprouvés, et du besoin que ce jeune homme avait d’une prolongation de congé pour tranquilliser son âme et régler les intérêts de sa nouvelle fortune. Ces démarches avaient eu un plein succès, et M. N*** n’avait rappelé Ernest auprès de lui que d’après l’avis que lui avait donné M. de Thiézac.

On n’entrera pas dans de plus amples détails sur ce qui touche Ernest. On dira seulement que ce jeune homme, rappelé à Paris, courut pendant sept ans la carrière diplomatique. La gravité que son caractère avait prise depuis la mort de sa cousine porta ses goûts vers les études sérieuses. Pendant les voyages qu’il fit en Amérique et en Europe, il eut l’occasion de perfectionner la connaissance qu’il avait déjà de plusieurs langues, et il s’est adonné particulièrement à l’étude de l’histoire. La plupart de ses loisirs étaient employés à des travaux dont on verra peut-être les résultats un jour.

Tout ce qu’il pouvait y avoir d’ambition dans l’âme d’Ernest ne s’appliquait pas à la recherche du pouvoir ou d’une grande fortune. Aussi, avec la capacité remarquable qu’il avait pour les affaires, ne fit-il pas, comme on dit vulgairement, son chemin. Son esprit recherchait naturellement l’é-