Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/167

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Quant à ce qu’il dit de son fils, don Camille, que vous verrez à Rome, ses reproches sont mieux fondés. Ce jeune homme fut beaucoup moins bien traité que ses sœurs. Il avait hérité des inclinations douces de son père, et il aurait eu besoin que l’on corrigeât de bonne heure, et par une éducation soignée, ce qu’il y avait d’inactif et d’indolent dans son caractère. Mais dona Olimpia, au contraire, l’entretint volontairement dans une ignorance telle, qu’à vingt ans c’était à peine s’il savait lire. « Quel motif avait donc sa mère pour agir ainsi ? demanda M. de Beauvoir. — On l’ignore, répondit l’abbé, et à Rome, où don Camille a toujours été aimé, on a cherché vainement à découvrir la raison secrète qui poussait sa mère à amoindrir ainsi le seul rejeton qui pût perpétuer la race des Pamphile. Vous savez, ajouta Segni en souriant, que sa mère l’a fait cardinal malgré lui, et qu’il a épousé la princesse de Rossano malgré sa mère ? — Non. — Oh ! alors je ne vous en dirai pas davantage ; je vous laisserai le plaisir d’apprendre toute cette histoire en détail à Rome. Continuons notre lecture.

« L’époque à laquelle il fut question qu’Urbain VIII donnât le chapeau de cardinal à J. B. Pamphile (1629) est aussi celle où dona Olimpia commença à faire pénétrer ses intrigues à la cour, pour aider son beau-frère à obtenir une faveur qu’elle désirait plus ardemment encore que lui. Elle réussit, et quand la nouvelle de l’élection lui parvint, la joie qu’elle en ressentit tint presque du vertige. Le lendemain de cet événement, son imagination était encore tellement exaltée, qu’elle répétait sans cesse à Pamphile, que tout ce qu’elle voyait lui paraissait couleur de pourpre.

» L’importance, et par suite les immunités concédées à Rome, par l’opinion, à ceux qui ont reçu le chapeau, enhardit dona Olimpia et le cardinal à secouer le joug de certaines convenances dont ils n’avaient point encore osé s’affranchir. Tous deux habitèrent le palais Pamphile, prirent leur repas à la même table, et traitèrent ensemble habituellement les nombreuses affaires contentieuses, juridiques et ecclésiastiques, soumises à l’examen ou à la décision du cardinal. « Ce sont des impostures de libelliste, » observa de Beauvoir