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activité et un développement momentané auxquels les autres états de l’Europe, moins riches d’or, furent souvent obligés de céder. À la cour de Rome, ainsi qu’à celle de Madrid, on ne tarda pas à se persuader qu’avec de l’or on obtient tous les genres de succès, on fait face à tous les besoins ; et tandis que l’Angleterre, la Hollande et les Pays-Bas s’efforçaient déjà de mettre à profit le chemin des deux Indes pour fonder leurs richesses sur le travail et le commerce ; dans le même moment que la France faisait des efforts d’intelligence et de courage pour perfectionner sa civilisation et se rendre redoutable par ses armes ; en Espagne et dans les états romains, au contraire, le préjugé de l’omnipotence de l’or commençait à rendre la noblesse inactive, les peuples paresseux, et fit négliger bientôt la profession des armes, ainsi que l’agriculture et l’industrie.

Chez les deux peuples cette insouciance générale ne tarda pas à produire deux classes inégales en nombre comme en puissance : une plèbe immense, misérable, orgueilleuse et toujours disposée à la révolte, au milieu de laquelle se trouva une poignée de gens raffinés, accoutumés au luxe, corrompus et avides de pouvoir, pour tirer des trésors de populations inhabiles à en produire.

Tels étaient les éléments disparates dont se composaient en particulier les états romains sous les pontificats d’Urbain VIII et d’Innocent X, lorsque, succédant aux avides Barberins, dona Olimpia, plus avide qu’eux encore, réduisait l’art de régner à celui d’amasser sans cesse et sans fin des richesses. L’or en ce temps était le pouvoir réduit à l’état de matière disponible sous toutes les formes comme à tous les instants, et tous les genres d’ambition se résolvaient en avarice.

Car ce serait une erreur de croire qu’Olimpia ait été avare dans le sens que l’on attache ordinairement à ce mot. Elle vivait avec grandeur, quoique avec économie ; le luxe de son palais, celui de ses fêtes, était proportionné au rang où le sort l’avait élevé. D’ailleurs elle se montrait simple dans ses goûts, modeste dans ses vêtements, et sa table était ordinairement frugale. Dans ses tentatives en faveur de son fils et