Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/318

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Pamphiles, quand il nous est possible par notre expérience et notre position de régler d’avance la conduite que nos neveux, nos enfants et leurs descendants pourront tenir, devons-nous les laisser en proie aux passions égoïstes de chacun d’eux, et souffrir qu’ils se divisent, se ruinent et se détruisent ? Ce n’est donc pas entre vous et moi qu’il est nécessaire d’établir des liens que la raison, jointe à la communauté d’intérêts, rend tout naturels ; mais entre vos neveux et leurs enfants, mais entre tous les membres de ma famille, qu’un malin génie semble se plaire à désunir. Il faut donc un lien indissoluble, un lien de famille entre nos deux maisons.»

À ces derniers mots Antoine Barberin redoubla d’attention.

« Maintenant, continua la princesse, que je crois vous avoir exposé ce qu’il y a de plus important et de plus délicat dans la combinaison intime de cette affaire, je vous ferai brièvement mes propositions, vous engageant à me répondre de la même manière. Votre frère, qui est mort en France, don Taddeo, a laissé deux fils. La princesse Justiniani, ma fille, a elle-même une fille âgée de douze ans et nubile. Voulez-vous consentir au mariage de l’aîné de vos neveux avec la jeune Olimpia Justiniani ? — Quelle sera sa dot ? — La restitution complète de vos biens. »

Barberin avait prévu cette réponse. Un assez long silence succéda à cette partie de l’entretien. Sa gravité avait ramené l’esprit du cardinal à ses habitudes de profonde réflexion, et le cas était tel qu’il méritait d’être médité. Rompant enfin le silence : « Une réponse brève, dit-il, et qui sera décisive, ne peut vous être donnée sur-le-champ, princesse. Il faut que je consulte le cardinal François, mon frère ; les convenances exigent que je parle à mes neveux, et moi-même j’ai besoin de quelques instants de calme pour me décider. Accordez-moi quelques jours. — Très-volontiers, » dit dona Olimpia en recevant les révérences du cardinal, qui se retira.

Mais la décision de cette affaire ne fut pas aussi prompte que dona Olimpia l’aurait désiré. En sortant du palais Pamphile, Antoine, revenu du premier étonnement causé parla proposition qui lui avait été faite, s’était bientôt aperçu que dona Olimpia, effrayée du défaut d’appui où elle et sa famille