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pour elle jusqu’à s’exposer à la mauvaise humeur du pape, Azzolini ne s’était pas montré moins attaché à ses intérêts en condamnant d’avance une démarche dont l’issue avait été si fâcheuse. Quoique avec peine, elle fit taire la jalousie que lui inspirait la princesse de Rossano, et pour profiter de l’influence de cette jeune femme auprès du nouveau pape, sans que son orgueil en souffrît, elle appela plus souvent près d’elle son fils dom Camille, le consulta, lui donna des instructions pour la conduite des affaires de la famille, et affecta même de témoigner publiquement au jeune prince une confiance et une espèce de tendresse qu’elle ne lui avait jamais montrées.

Ce fut là la dernière lueur du génie de dona Olimpia. Sa volonté triompha encore cette fois de ses passions ; et par l’intermédiaire de son fils, du fond de son palais, elle eut l’art de prescrire à ses filles, à sa bru, à ses gendres, tout ce qu’il était à propos de faire auprès des cardinaux, des princes et des grands de Rome, pour les effrayer sur les suites d’une enquête et d’un procès où tant de personnes risquaient d’être compromises, et dont l’éclat en Europe pourrait porter un si grand préjudice au gouvernement du saint-siége. Attaquant le mal dans sa racine, elle pria Azzolini de faire comprendre à Rasponi ainsi qu’à Fagnani tout le danger qu’il y aurait à revenir sur ce qui était fait depuis si longtemps, et par le concours de tant de personnes qui ne pourraient peut-être pas dénoncer les autres sans se compromettre elles-mêmes. Cette considération, dont dona Olimpia avait calculé toute la puissance, et qu’Azzolini fit valoir avec une rare habileté, rendit tous les gens de la cour plus circonspects sur les accusations qu’ils lançaient contre dona Olimpia, et tint en bride les deux hommes dont cette femme soupçonnait la fidélité. Les requêtes et les plaintes n’arrivèrent pas moins de toutes les provinces ; mais de ce moment elles restèrent enfouies dans les offices, sans qu’on les fît connaître, et bientôt on répandit dans le public que l’enquête se continuait avec soin, mais que la complication des détails était telle, qu’il était impossible de prévoir quand s’ouvrirait le procès.

Azzolini, qui conduisait toute cette affaire sans paraître y