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tainement bien aimé cette femme ; mais de ce jour seulement, il eut la conscience de l’estime profonde que méritait l’admirable bon sens de sa cousine, et après avoir maudit les mauvaises pensées qui avaient souillé un instant son esprit, il ne s’occupa plus que des soins qu’exigeaient son départ et son voyage.

Courant la poste nuit et jour, il fut bientôt à Paris, où il retrouva, dans le ministre des relations extérieures, auprès duquel sa mission l’appelait, M. de X***, qui un an avant l’avait fait venir de Clermont sur la recommandation de M. de Thiézac. La manière dont Ernest traita la partie des affaires qui lui avait été confiée de vive voix par l’ambassadeur de France à Rome, lui valut des éloges de la part de M. de X***, qui lui fit entendre qu’il comptait sur lui quand il y aurait quelques négociations délicates à traiter. Notre jeune diplomate fut sensible à ces louanges ; toutefois il eut l’idée de les faire tourner au profit de son cœur, au lieu d’en repaître sa vanité.

— Mon oncle, M. de Liron, est mal portant, dit-il à son patron ; si je pouvais croire que mes services ne vous seront pas utiles pendant quelques semaines, je prendrais la liberté de vous demander un congé pour l’aller voir.

— Votre cousine ne se porte pas bien non plus, dit M. de X***, tout en réfléchissant à la demande que lui faisait Ernest. Eh bien ! allez, allez les voir, continua-t-il d’un air indifférent. Mais vous serez remplacé à Rome, je vous garde, et tenez-vous pour averti que, selon toute vraisemblance, le premier voyage que vous ferez sera long.

Ernest, avant de partir et pendant son voyage, n’avait écrit à sa cousine ni de Rome, ni même de Lyon, ville dans laquelle il s’arrêta deux heures, à cause de l’incertitude où il était de savoir s’il pourrait obtenir la permission d’aller en Auvergne. Forcé de se reposer au moins deux jours à Paris après un voyage long et fatigant, ce fut de là qu’il envoya quelques lignes à mademoiselle de Liron pour lui apprendre son arrivée prochaine et son séjour à Chamaillères.

Le lieu de la date et la lecture de ce billet, car il n’y avait que quelques mots, causèrent un mélange d’émotions toutes