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On se disposait à fêter ce double événement. On avait rebadigeonné la maison, préparé le pain et le vin[1]. Il semblait qu’Elias regagnât le foyer comme un étudiant en vacances ; et ce n’était pas sans une sorte d’orgueil que ses parents, une fois terminée la disgrâce de leur fils, s’apprêtaient à le recevoir.

Enfin arriva le jour attendu si impatiemment, surtout par Zia Annedda[2], la mère, une petite femme placide, blanche, un peu sourde, qui aimait Elias plus que tous ses autres enfants. Le frère aîné, Pietro, qui était laboureur, Mattia, le plus jeune frère, et Zio Berte, le père, qui étaient pâtres, revinrent de la campagne. Mattia et Pietro se ressemblaient beaucoup ; l’un et l’autre étaient bas de taille, robustes, barbus, avec une face cuivrée et de longs cheveux noirs. Zio Berte Portolu, — le vieux renard, comme on l’appelait, — était bas de taille, lui aussi, avec une fameuse chevelure noire très emmêlée qui retombait jusque sur ses yeux rouges et malades, et qui, près des oreilles, venait se confondre avec

  1. Dans beaucoup de villages sardes, on fait usage d’un pain qui se conserve plusieurs semaines sans se gâter. Pour les fêtes, on en prépare d’une autre qualité, qui reste frais plusieurs jours.
  2. En Sardaigne, on donne le nom de zio et de zia (oncle, tante) à tous les hommes et à toutes les femmes du peuple qui sont d’un âge un peu avancé.