Page:Delille - L Homme des champs 1800.djvu/30

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retraite : je le trouvai dans un cabinet au fond du jardin, seul avec son chien, qu’il paroissoit aimer extrêmement. Il me répète plusieurs fois combien mon entreprise lui paroissoit audacieuse. Je lis, avec une grande timidité, une trentaine de vers. Il m’arrête, et me dit : « Non-seulement je ne vous détourne plus de votre projet ; mais je vous exhorte à le poursuivre. » J’ai senti peu de plaisirs aussi vifs en ma vie. Cette entrevue, cette retraite modeste, ce cabinet où ma jeune imagination croyoit voir rassemblées la piété tendre, la poësie chaste et religieuse, la philosophie sans faste, la paternité malheureuse, mais résignée, enfin le reste vénérable d’une illustre famille prête à s’éteindre faute d’héritiers, mais dont le nom ne mourra jamais, m’ont laissé une impression forte et durable. Je partis, plein d’ardeur et de joie, croyant avoir entendu non-seulement la voix du chantre de la religion, mais quelques accens de l’auteur d’Athalie, et je suivis ma pénible entreprise, qui m’a valu des éloges dont je suis flatté, et des critiques dont j’ai profité.

À l’opinion de Racine je puis joindre celle