Page:Delille - L Homme des champs 1800.djvu/88

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Sous leurs coups redoublés le mont cède en croulant ;
La brouette aux longs bras, qui gémit en roulant,
Qui, partout se frayant un facile passage,
Sur son unique roue agilement voyage,
S’emplissant, se vidant, allant, venant cent fois,
Des débris entassés transporte au loin le poids.
Enfin le mont succombe ; il s’ouvre, et sous sa voute
Ouvre au ruisseau joyeux une facile route.
La Nayade s’étonne, et, dans son lit nouveau,
À ses brillans destins abandonne son eau.
Il vient, il se partage en fertiles rigoles ;
Chacun de ses filets sont autant de Pactoles :
Sur son passage heureux tout renaît, tout verdit.
De ses états nouveaux son onde s’applaudit,
Et, source de fraîcheur, d’abondance et de gloire,
Vous paye en peu de temps les frais de la victoire.
Dans les champs où, plus près de l’astre ardent du jour,
Au sein de ses vallons Lima sent, tour à tour
Par le vent de la mer, par celui des montagnes,
Le soir et le matin rafraîchir ses campagnes,
Avec bien moins de frais et bien moins d’art encor,
L’homme sait des ruisseaux disposer le trésor,
Et, suivant qu’il répand ou suspend leur largesse,
Retarde sa récolte ou hâte sa richesse.
Près du fruit coloré la fleur s’épanouit,
L’arbre donne et promet, l’homme espère et jouit.