Page:Delluc - Monsieur de Berlin, 1916.djvu/61

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dîner au Café de Paris un de ces jours, hé, hé !

La conversation ne valait pas le menu. Elle pouvait lui être supérieure. Je n’exagère pas. Ce pouvait être une conversation extraordinaire. Plusieurs fois, elle a atteint ce degré de charme puissant où se rencontrent les causeurs d’élite, qui sont à la fois des penseurs d’envergure et des esprits délicats. Mais elle n’est pas restée à ce degré-là. Thülow s’est chargé de tout gâter.

C’est-à-dire, dans sa pensée, de tout arranger.

Si je pouvais dire à Thülow ce que je pense de lui ? Mais c’est un homme dont on ne peut se passer. Qu’arriverait-il sans lui ? Ce n’est pas qu’il ait de hautes conceptions économiques ou diplomatiques, mais il a un sens critique inouï. On peut se lancer, on peut aller très loin, on peut aller trop loin, il est toujours là pour éviter une gaffe. C’est bien commode.

C’est un grand homme d’État.

Une fois de plus, on aura vu un grand homme d’État insupportable dans un dîner. Il m’a bien gêné avec sa prudence et ses réticences. Ah, la franchise !

J’aurais voulu parler de la France, moi. D’ailleurs on a beaucoup parlé de la France, mais pas de la façon que j’espérais. Pourquoi ne peut-on parler un peu plus librement ? Je ne