Page:Delly - Dans les ruines, ed 1978 (orig 1903).djvu/22

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qui s’ouvrit en grinçant, et sur le seuil apparut une femme de haute taille, derrière laquelle une paysanne en large capot blanc élevait une lanterne.

Et, à cette lueur vive, Alix vit celle dont elle devinait le nom. Elle pouvait distinguer tous les traits de ce visage flétri, mais conservant néanmoins une certaine beauté hautaine et cette chevelure d’un blond superbe, si semblable à celle de Mme de Sézannek… mais surtout les yeux, brillants et impérieux, où semblait s’agiter un monde de pensées mystérieuses et troublantes…

De son côté, celle qui était évidemment Georgina de Regbrenz — Mme Orzal — s’était arrêtée et dévisageait la jeune fille que la lumière frappait en plein visage. Alix, un peu penchée à la portière, avait relevé son voile, et sa jeune tête, si belle, apparaissait distinctement… Une singulière expression passa comme un éclair dans le regard de Georgina… mais, reprenant aussitôt sa présence d’esprit, elle descendit lentement le perron aux marches disjointes.

Alix dut faire un violent effort sur elle-même pour ne pas reculer. L’approche d’un serpent ne lui eût pas inspiré une plus vive répulsion que celle de cette femme qui avait fait souffrir sa mère.

— Descendez donc, enfants ! dit une voix douce, aux intonations délicieuses. Notre vieux Fanche ne songeait pas à vous faire les honneurs de la maison, mais j’ai heureusement entendu la voiture… Je suis votre tante Georgina.

Tout en parlant, elle ouvrait la portière et tendait la main à Alix. Celle-ci y posa la sienne toute tremblante et glacée et sauta à terre.

— Voici Xavier, je suppose ? dit Mme Orzal en recevant des mains de miss Elson le petit garçon à moitié endormi. Et celui-ci, c’est Gaétan ?

La servante, descendue à la suite de sa maîtresse,