Page:Delly - Dans les ruines, ed 1978 (orig 1903).djvu/41

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défendre de retourner sur le promontoire, c’était fatalement l’inciter à le faire en cachette.

— Il faudra veiller sur lui le mieux possible, dit miss Elson à qui elle confia son nouveau tourment en revenant vers le manoir. D’ailleurs, en lui montrant l’indiscrétion de semblables incursions dans la demeure d’autrui, fût-elle celle d’un mendiant, il y a lieu d’espérer que l’enfant, ayant déjà très vif le sentiment des convenances sociales, ne retombera pas dans sa faute.

— Quelle tristesse de voir un être humain empoisonner ainsi sa pauvre âme ! murmura Alix en songeant à l’habitant inconnu de la maisonnette. Combien cet homme doit être malheureux et dégradé !

En arrivant en vue du manoir, l’Anglaise et ses élèves aperçurent Mme Orzal au seuil du salon situé au rez-de-chaussée de la tour.

— Le déjeuner est prêt, annonça-t-elle lorsqu’ils furent un peu rapprochés.

Et, leur faisant signe de la suivre, elle rentra dans le salon.

M. de Regbrenz et sa femme étaient assis à la même place que la veille. La vieille dame leva vers les enfants son regard inconscient, et une sorte de vague sourire passa sur sa physionomie. Le comte se détourna un peu vers eux, marmotta entre ses dents un bref « bonjour » en réponse à leur salut respectueux et reprit la lecture d’un vieux journal, froissé et sale.

— Venez donc déjeuner, mon père ! dit Georgina avec impatience. Voilà un quart d’heure que Mathurine est venue nous prévenir… Ces nouvelles vieilles de deux mois ne peuvent avoir un intérêt palpitant.

— Eh ! qu’elles soient de deux mois, de dix mois, de deux ans, que m’importe ! mâchonna-t-il furieusement entre ses dents. Que le monde marche à sa