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L’ONDINE DE CAPDEUILLES


avait écrit que M. de Montluzac lui prêtait des livres de sa bibliothèque, aurait été fort rassuré s’il avait pu constater le soin apporté par Odon dans ce choix d’autant plus délicat que Roselyne avait été jusqu’ici tenue à l’écart des réalités de la vie, qu’il importait de ne lui révéler que peu à peu pour ne pas effaroucher la petite âme fraîche, si heureuse dans son innocence.

Dans le salon de musique, une pièce en rotonde au plafond peint par Fragonard, M. de Montluzac venait parfois trouver sa cousine, à l’heure de son étude. Ils faisaient de la musique, en s’interrompant pour parler d’art, de littérature. Ou bien Odon racontait ses voyages, de façon alerte et fine. Il était un conteur délicieux et les instants passaient bien vite en l’écoutant. Puis, quelquefois, sous prétexte de choisir un livre pour Roselyne, ou de lui montrer le dessin de quelque antique monument, il l’emmenait dans son cabinet. Alors, délivrée de la présence de Mme Berfils, elle parlait de son cher passé, de ses heures de tristesse, de tout ce qui occupait son jeune cœur. Avec une confiance ingénue, elle disait à son cousin ses étonnements naïfs de petite fille jusque-là enfermée dans une tour d’ivoire, et qui en descend pour se mêler à la vie habituelle…

— Odon, je trouve les gens bien malhonnêtes,