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L’ONDINE DE CAPDEUILLES


Il la conduisit chez Mme de Liffré, et ne la quitta que lorsqu’il l’eut vue un peu calmée. Il revint alors à son cabinet. Dans la pièce toute éclairée par la lumière du couchant, il se mit à marcher de long en large, d’un pas nerveux. Son visage tendu, ses yeux assombris témoignaient d’une ardente agitation intérieure. Entre ses dents, il murmura :

— Quel fou je suis ! Quel fou !

Il s’approcha de son bureau et s’assit machinalement. Son front s’appuya sur sa main. Il pensait : « Ma grand’mère avait raison. Elle n’est plus une enfant. Elle n’est plus tout à fait la petite Roselyne que je pouvais traiter en sœur. Il faut que je change ma manière d’être, à son égard — tout doucement, pour ne pas lui faire de peine, pauvre petite. Il le faut, pour elle et pour moi. Je ne l’aime pas encore, certainement… non, je ne peux pas dire… »

Qu’était-ce donc, pourtant, que ce frisson qui l’avait secoué, tout à l’heure, quand elle s’appuyait contre lui, tremblante encore et si confiante, et qu’elle l’avait regardé avec cette tendresse profonde, éblouissante ? Qu’était-ce que cette impression si nouvelle, si merveilleusement enivrante ?

Il restait immobile, comprimant son front de sa main brûlante. Il se disait : « Je pourrais