Page:Delphine de Girardin - Poésies complètes - 1856.djvu/247

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Une fois à l'espoir mon cœur osa prétendre ;
D'un bien commun à tous je rêvai la douceur.
Mais celui que j'aimai ne voulut pas m'entendre.
Et, si parfois mes maux troublaient mon âme tendre,
 L'ingrat ! il m'appelait sa sœur !

Une autre aussi l'aima ; je l'entendis près d'elle,
Même en voyant mes pleurs, bénir son heureux sort,
Et celui dont la joie allait causer ma mort,
Hélas ! en me quittant ne fut point infidèle.

Je ne puis l'accuser ; dans son aveuglement,
S'il a en ma douleur méconnu le langage ;
C'est qu'il croyait les cœurs promis à l'esclavage
Indignes de souffrir d'un si noble tourment !

Malgré le trait mortel dont mon âme est atteinte,
Auprès de ma rivale on me laissait sans crainte.
Elle avait vu mes pleurs et les avait compris ;
Mais, ô sort déplorable ! ô comble de mépris !
Charles, je t'adorais... et ton heureuse épouse
Connaissait mon amour et n'était point jalouse !

Que de fois j'enviai la beauté de ses traits !
En l'admirant mes yeux se remplissaient de larmes ;
Et triste, humiliée, alors je comparais
Le deuil de mon visage à l'éclat de ses charmes !

Pourquoi m'avoir ravie à nos sables brûlants ?
Pourquoi les insensés, dans leur pitié cruelle,
Ont-ils jusqu'en ces lieux conduit mes pas tremblants ?
Là-bas, sous mes palmiers, j'aurais paru si belle !