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m’a monté et chauffé en diable. Ce que vous nous avez lu de votre livre est beau, complètement beau. Allez-y ! et ne vous laissez plus distraire par rien d’étranger à Élisa. Ma bourgeoise est très exaltée, et, de chez vous au Marais, hier, on en a dit du mal de l’homme d’Auteuil, dans la petite voiture.

Julia persiste à trouver que votre arrivée, à la fin, gâte le beau paysage crayeux. Vous verrez ça quand le livre sera fini. Ce qu’il faut, c’est garder le paysage et cette agonie aux lèvres gonflées de mots qui ne sortent pas. Je vous serre la patte avec amitié et très grand respect, car elle tient un fier morceau de porte-plume.

Alphonse Daudet.

Mais le livre que l’auteur avait conçu chaste et sévère, qu’il avait pris soin d’expliquer dans une préface, qu’il avait refusé de donner par morceaux, suivant sa coutume, dans la presse quotidienne[1], lui échappa complètement, à partir du jour de la publication. Le Nain jaune qui, en dehors de l’auteur, avait jugé bon d’offrir la Fille Élisa en prime à ses abonnés, pour mieux hameçonner ses lecteurs, fit précéder l’envoi du livre par un éreintement pudibond. Le Gaulois se voila la face et M. Edmond Tarbé termina son article par cette déploration mélancolique sur un livre qu’il daignait appeler pourtant une curiosité intellectuelle :

« Sur l’exemplaire de son livre qu’il nous a envoyé, M. de Goncourt a écrit : Hommage sympathique de l’auteur.” Après quoi il a signé.

« Certes, jamais M. de Goncourt n’a eu davantage le droit de compter sur une plus grande réciprocité de sympathie que celle que nous lui avons vouée. Son caractère et son talent sont, pour nous, l’objet d’une

  1. Nous relevons dans le Journal posthume inédit la note suivante :

    Samedi, 30 janvier 1877. — Une chose dure et qui m’a été bien pénible aujourd’hui, ç’a été de signer, à la place habituelle où étaient Edmond et Jules, de signer d’un seul nom un livre sous presse.