Page:Delzant - Les Goncourt, 1889.djvu/279

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fils qu’il était aurait pu aussi ne pas écrire l’Enfant et le Bachelier où ses père et mère sont malmenés d’étrange sorte. Il semble que son plus grand défaut ait été une vanité exaspérée et turbulente, un besoin de bruit autour de son nom qui l’ont porté aux actes fort coupables et lui faisaient lancer les paradoxes les plus grossiers. Son ami cite de lui : « Victor Hugo est l’homme le plus bête de France ! » Il aimait à dire : « Homère aux Quinze-Vingts ! » Voilà la note. L’homme simple et timide n’y allait pas de main morte !

Mais tout ceci n’a rien à faire avec sa valeur littéraire qui est réelle. Il a été un artiste très personnel, très puissant, frappant toujours fort et quelquefois juste, d’une originalité sinistre et dantesque. L’âpreté habituelle de sa pensée donnait à ses images une vigueur brutale. Ce paria semblait écrire avec de l’eau-forte. Il fouettait ses indignations d’une verve ardente et sombre et d’une palpitante énergie.

Je crois que ce fut encore le besoin de bruit et l’envie lancinante de se singulariser qui fit de lui, un soir, le défenseur de Henriette Maréchal. Quand le quartier latin se rendit en foule au Théâtre Français pour faire tomber la pièce des protégés de la princesse Mathilde, Jules Vallès dut se dire que ses coups de sifflets ne seraient pas plus stridents que ceux des autres et qu’il serait plus original de se mettre du parti des auteurs. Croire qu’il avait cure de la liberté du théâtre ou que le bon sens le faisait agir serait lui faire beaucoup d’honneur. Il trouva une veine heureuse ce jour-là et il écrivit trois ou quatre fort bons articles dont nous avons cité quelques extraits.

Les Goncourt, qui ne le connaissaient pas, lui furent reconnaissants de son coup d’épaule. Ils furent séduits