Page:Delzant - Les Goncourt, 1889.djvu/44

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ferai rien, pour me servir d’une expression fausse mais usitée. Je sais que je m’expose ainsi aux morales continues d’une partie de ma famille qui voudrait prendre la responsabilité de mon bonheur, en me casant dans un de ces parcs à additions ou à copies de lettres qui sont le débouché reçu de presque tous les jeunes gens dans ma position ! Mais, que veux-tu ? je n’ai nulle ambition. C’est une monstruosité, mais c’est comme cela. La plus belle place du monde, la mieux appointée, on me la donnerait que je n’en voudrais pas. Pour moi, je trouve que les fonctions publiques, si recherchées, si encombrées aujourd’hui, ne valent pas une seule des courbettes qu’on fait pour les obtenir. C’est mon opinion, et comme la chose me regarde, j’ai le droit de m’y tenir… »[1]

Donc, entrés successivement, par la mort de leur père et de leur mère, en possession d’une fortune modeste mais suffisant à les exonérer des préoccupations matérielles et leur permettant de se livrer à leurs goûts, les deux frères résolurent d’attaquer franchement le métier de peintre et, pour cela, d’aller passer un an ou deux en Italie.


IV

Voyage en France et en Algérie.
Débuts littéraires.

L’Italie était aussi troublée que la France. Mazzini et Garibaldi agitaient Rome, Gioberti le Piémont, Montanelli la Toscane ; Manin venait de proclamer la Répu-

  1. Lettres, p. 24.