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depuis hier, les muses de Clodion pleurent sur une urne de marbre blanc. »[1]

De Barye, sur lequel, trente-quatre ans plus tard, M. Edmond de Goncourt devait écrire un si merveilleux article servant de préface au Catalogue de la vente Sichel, nous trouvons ici déjà une critique nerveuse et sentie : « Un Jaguar dévorant un lièvre. — Le jaguar, le train de derrière sorti de terre, est aplati sur ses pattes de derrière, le ventre creusant le sol. Arc-bouté sur sa patte gauche dont la tête d’humérus fait saillie au-dessus de la ligne serpentante et effacée de tout le corps, il fouille d’un mufle court et arrondi les entrailles d’un lièvre, il fouille, le cou tout plein de superbes gonflements. L’avalement de la croupe mamelonnée de puissantes contractions musculaires, la souplesse des pattes de derrière ramassées sous la bête, la tranquillité du dos où la peau moins tendue se plisse sur le côté, la tension des muscles, les terribles froncements de la face, l’ampleur des mâchoires, les oreilles couchées, la mollesse de la patte droite, le travail de la robe, travail sans relief, travail de rayures couchées dans le sens du poil, les rampements faméliques, le beau dessin et la belle nature des raccourcis, l’opposition de parties de musculature au repos, de parties de musculature tourmentée, tout ce surprenant mélange d’élasticité et de force, font de ce bronze une de ces imitations de la grande nature féline, une de ces imitations au delà desquelles, nous le croyons sincèrement, la sculpture ne peut aller. »

Dans l’Éclair aussi avait paru la Lorette, un de ces petits livres aux cantharides, in-32, appelés physiologies, dont la vogue fut grande au commencement de

  1. C’est le sujet qu’a choisi le statuaire Crauk pour le bas-relief du tombeau de son maître Pradier.