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Cousin, Montalembert produisaient encore. De près ou de loin, il n’est fait mention ni de leurs travaux ni de leur influence. Eux aussi, pourtant, étaient des types d’hommes de lettres…

Cependant on voit groupés autour du personnage principal, quelques figures d’élite sous lesquelles il est très facile de mettre des noms.[1] C’est bien Théophile Gautier, ce Masson, « une face pleine, presque lourde, le masque empâté d’un dieu où la divinité dort, des yeux où une intelligence superbe semble sommeiller dans la paresse et la sérénité du regard ; dans toute cette tête une lassitude et une force de Titan au repos, » et de la bouche duquel tombe doucement cette phrase : « Critiques et louanges me louent et m’abîment sans comprendre un mot de ce que je suis. Toute ma valeur — ils n’ont jamais parlé de cela — c’est que je suis un homme pour qui le monde visible existe… »

Quel délicieux portrait que celui de Paul de Saint-Victor, sous le masque de Rémonville. Enfin Charles Demailly, avec les frissons morbides de son âme et de son corps, sa verve étincelante, ses enthousiasmes éloquents et excessifs, et ses dénigrements violents, qui, dans une lettre à un ami, écrit ces mots qui renferment toute la philosophie du livre : « Nous nous calomnions nous-mêmes, » Charles Demailly n’est-il pas la personnification étonnamment juste des deux auteurs.

Oui, ce Charles Demailly, tous les deux ils l’ont vécu. Une vision subjective pouvait seule leur donner la pénétration aiguë qui fait de ce livre, composé

  1. Voici la clef de quelques silhouettes d’écrivains pourctraits dans les Hommes de lettres : Pommageot, Champfleury — Florissac, Adolphe Gaiffe — Montbaillat, Villemessant — Charvin, Arsène Houssaye — Boisroger, Th. de Banville — Lampérière, Gustave Flaubert — Puisigneux, Ch. de Villedeuil.