Page:Derème - Le Poème de la pipe et de l’escargot, 1920.djvu/12

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Que mes poèmes soient étranges
et qu’on les raille et leur auteur,
cela m’est peu, car les louanges
ne sont pas chères à mon cœur,

hors celles de quelques poètes
au cœur fervent, au regard pur
et qui nagent, blanches mouettes,
dans les ténèbres et l’azur.

Ma vie en silence s’écoule,
c’est pour peu d’hommes que j’écris,
car si je chantais pour la foule
je pousserais bien d’autres cris.

Des deux poings défiant les astres
je clamerais à grands fracas
et ferais crouler les pilastres
et les balustres sur mes pas ;

ou, plaignant ma longue misère
en des tumultes mesurés,
d’une voix qu’on dirait sincère,
Apollon, je t’invoquerais.