Page:Des Essarts - Les Voyages de l’esprit, 1869.djvu/195

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tard. De là certaines exagérations des premiers romans et des premiers drames, qui ne se retrouveront ni dans Notre-Dame-de-Paris, ni dans Ruy Blas. Outrances regrettables peut-être, mais peut-être aussi fatales à leur heure ! Telles furent certaines paroles, certaines motions de Mirabeau, qui hâtèrent la marche de la Révolution et précipitèrent la chute de ses bruyants ennemis. Bruyants aussi et de mauvaise foi étaient les adversaires de Victor Hugo. Eux également s’acharnaient à des priviléges et ne voulaient pas en être dépossédés par une révolution du goût public. Qu’auraient-ils fait dans leurs citadelles vermoulues, épopée selon le Batteux, tragédie suivant d’Aubignac, poëme didactique d’après Delille ? Ajoutez que ces faux classiques, plus ou moins académiciens, s’intitulaient libéraux et s’autorisaient de leur libéralisme pour faire la guerre à celui qui devait les dépasser en politique autant qu’en poésie, et laisser la charte aussi loin que le code arbitraire d’Aristote. Apôtre de la liberté dans l’art, Victor Hugo avait contre lui, par une étrange confusion, tous les chefs de file du parti libéral ; non pas, il est vrai, les maîtres immortels de ce parti, un Benjamin Constant, un Lafayette, un Voyer-d’Argenson, mais ces libéraux de circonstance excités contre la Restauration par les intérêts révolutionnaires et leurs propres ambitions, plutôt que par les grandes exigences de 89 ; ces caméléons qui devaient être les satisfaits de 1832, après avoir été les muets de 1812 ; auteurs de tragédies à rimes pauvres et à mesquines allusions, qui, sous l’Empire, n’avaient