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ÉLÉGIES

LA NUIT D’HIVER.

Qui m’appelle à cette heure, et par le temps qu’il fait ?
C’est une douce voix, c’est la voix d’une fille
Ah ! je te reconnais ; c’est toi, Muse gentille,
Ton souvenir est un bienfait.
Inespéré retour ! aimable fantaisie !
Après un an d’exil, qui t’amène vers moi ?
Je ne t’attendais plus, aimable Poésie,
Je ne t’attendais plus, mais je rêvais à toi.

Loin du réduit obscur où tu viens de descendre,
L’amitié, le bonheur, la gaité, tout a fui :
Ô ma Muse ! est-ce toi que j’y devais attendre !
Il est fait pour les pleurs et voilé par l’ennui.
Ce triste balancier, dans son bruit monotone,
Marque d’un temps perdu l’inutile lenteur ;
Et j’ai cru vivre un siècle, hélas ! quand l’heure sonne,
Vide d’espoir et de bonheur.

L’hiver est tout entier dans ma sombre retraite :
Quel temps as-tu daigné choisir !
Que doucement par toi j’en suis distraite :
Oh ! quand il nous surprend, qu’il est beau le plaisir !