Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, I.djvu/24

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lement ami du philosophe. Le précieux dépôt fut donc envoyé en France, où il n’arriva qu’après bien des retards, en 1653. Là un dernier malheur l’attendait, qui faillit tout perdre irréparablement : le coffre qui contenait les manuscrits, venu par mer jusqu’à Rouen, fut ensuite confié à un bateau qui devait remonter la Seine jusqu’à Paris ; à l’approche de cette ville le bateau coula, et les manuscrits de Descartes restèrent trois jours au fond de l’eau, « au bout desquels Dieu permit qu’on les retrouvât à quelque distance de l’endroit du naufrage. Cet accident fit que l’on fut obligé d’étendre tous ces papiers dans diverses chambres pour les faire sécher. Ce qui ne put se faire sans beaucoup de confusion, surtout entre les mains de quelques domestiques qui n’avoient point l’intelligence de leur maître (Clerselier) pour en conserver la suite et l’arrangement. » Ces détails se trouvent dans la Vie de Mons. Des-Cartes, 1691, t. II, p. 428 : l’auteur, Adrien Baillet, devait être bien renseigné, car il composa son ouvrage en collaboration avec l’abbé Jean-Baptiste Legrand, à qui Clerselier avait légué ces papiers en 1684, non sans lui en avoir sans doute conté les mésaventures. Cependant Clerselier, dans sa Préface de 1657, ne dit mot du naufrage ni du sauvetage, et déclare seulement que ce qui lui a donné le plus de peine, « a esté que ces lettres n’estant écrites que sur des feuilles volantes, toutes détachées les vnes des autres, et souuent sans datte ny reclame, le desordre qui s’y estoit mis auoit fait qu’elles ne se suiuoient point, et qu’on n’y reconnoissoit ny commencement ny fin ; de sorte, » ajoute-t-il, « que i’ay esté obligé de les lire presque toutes, auant que de les pouuoir rejoindre les vnes aux autres, et de leur pouuoir donner aucune forme, pour les disposer par apres dans l’ordre et dans le rang qu’elles tiennent ».

Mais un examen attentif des trois volumes fait reconnaître que le désordre, dont se plaint l’éditeur, n’existait pas pour toutes les lettres, et qu’un assez bon nombre, sans doute rassemblées et peut-être même cousues en plusieurs liasses (les articles A,