Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, I.djvu/312

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n’ay pas eſté vne ſeule fois tenté d’y retourner, ſinon depuis qu’on m’a mandé que vous y eſtiez. Mais cette nouuelle m’a fait connoiſtre que ie pourrois eſtre maintenant quelqu’autre part plus heureux que ie ne ſuis icy, & ſi l’occupation qui m’y retient n’eſtoit, 5 ſelon mon petit iugement, la plus importante en laquelle ie puiſſe iamais eſtre employé, la ſeule eſperance d’auoir l’honneur de voſtre conuerſation, & de voir naiſtre naturellement de|uant moy ces fortes penſées que nous admirons dans vos ouurages, ſeroit 10 ſuffiſante pour m’en faire ſortir. Ne me demandez point, s’il vous plaiſt, quelle peut eſtre cette occupation que i’eſtime ſi importante, car i’aurois honte de vous la dire ; ie ſuis deuenu ſi philoſophe, que ie mépriſe la plus-part des choſes qui ſont ordinairement 15 eſtimées, & en eſtime quelques autres dont on n’a point accouſtumé de faire cas. Toutesfois, pource que vos ſentimens ſont fort éloignez de ceux du peuple, & que vous m’auez ſouuent témoigné que vous iugiez plus fauorablement de moy que ie ne 20 meritois, ie ne laiſſeray pas de vous en entretenir plus ouuertement quelque iour, ſi vous ne l’auez point deſagreable. Pour cette heure, ie me contenteray de vous dire que ie ne fuis plus en humeur de rien mettre par écrit, ainſi que vous m’y auez autresfois 25 vû diſpoſé. Ce n’eſt pas que ie ne faſſe grand état de la reputation, lors qu’on eſt certain de l’acquérir bonne & grande, comme vous auez fait ; mais pour vne mediocre & incertaine, telle que ie la pourois eſperer, ie l’eſtime beaucoup moins que le repos & la tranquillité 30 d’eſprit que ie poſſede. Ie dors icy dix heures toutes