Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, I.djvu/623

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la carriere du monde, & ne laiſſer rien a dire aux ſçauans, ny a ſouhaitter aux apprentifs de celle iolie eſtude iournaliere, que vous aurez illuſtrée le premier, & ſortie de l’embarraſſante obſcurité des 5Italiens, qui faciunt non intelligendo[1], &c. Ie n’entens pas vous importuner : d’abord ie vous ay limité l’eſpace de trois fueillets ; icy vous aurez celuy de trois années, s’il en eſt beſoin ; mais qu’il nous ſoit permis d’eſperer qu’vn iour vous mettrez la derniere main 10 au traicté ; car a ne faire point de conſideration de mes intereſts, qui font ceux du publiq, d’auſtres plus importants, qui ſont les voſtres, me font iuger qu’il ne doit rien ſortir d’imparfait de chez vous. Mais i’attens voſtre loy & tiens mon preiugé en ſuſpens. 15 Pardonnez-moi, Monſieur, ſi le gouſt que vous m’auez donné d’encor quelques points de conſideration demeurés a vuider par faulte de place dans mes trois fueillets, m’ont eſmeu cette ſaliue & porté mon auarice a vous les demander a loiſir. Peut-eſtre que dans les 20 3 ans que ie determine, vous n’y perdrez que trois iours en ſomme, & vous voyez quelle minute c’eſt du ſiecle que vous auez reſolu de viure[2], outre que vous n’en auez pas refuſé dauantage a l’impertinence de Louuain, ainſi faut-il que ie baptize leur foibleſſe en 25 paſſant. Car, ſans flatterie, Monſieur, iamais la ſageſſe que vous auez eſtudiée n’a paru a plus viues enſeignes, que quand vous auez commandé a voſtre indignation très iuſte de confondre tant d’ignorance aueq tant de retenue. Ie ne ſçay ſi la philoſophie aueugle

  1. Lettre LXXXIV du 8 sept. 1637, p. 396-397.
  2. Lettre CII du 25 janvier 1638, p. 507, l. 7-8.