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94 OEuvRES DE Descartes. i 19-120.

combien neceffairement elles font iointes entr'elles. Mais fi nous examinons loigneufement, Içauoir, ii l'exiftence conuient à l'e^lre Ibuuerainement puiflant, & quelle forte d'exillence, nous pourrons clairement & dillindement connoiftre, premièrement, qu'au moins l'exiftence poffible luy conuient, comme à toutes les autres chofes dont nous auons en nous quelque idée diftinde, mefme à celles qui font compofées par les fictions de noltre efprit. En après, parce que nous ne pouuons penfer que fon exiflence elt poflible, qu'en mefme temps, prenans garde à fa puilfance infinie, nous ne connoifiions

152 qu'il peut exifter | par fa propre force, nous conclurons de là que réellement il exilte, & qu'il a eité de toute éternité. Car il eil tres- manifefte, par la lumière naturelle, que ce qui peut exifler par fa propre force, exifte toufiours; & ainfi nous connoiltrons que l'exi- llence neceffaire eil contenue dans l'idée d'vn élire fouuerainement puilTant, non par aucune f-dion de l'entendement, mais pource qu'il apartient à la vraye & immuable nature d'vn tel élire, d'exi- lier ; & nous connoiÛrons aulîi facilement qu'il elt impofiible que cet eltre fouuerainement puiffant n'ait point en luy toutes les autres perfedions qui font contenues dans l'idée de Dieu, en forte que, de leur propre nature, & fans aucune fiction de l'entendement, elles foycnt toutes iointes enfemble, & exiilent dans Dieu. Toutes lef- quelles chofes font manifeiks à celuy qui y penfe ferieufement, |& ne différent point de celles que i'auois délia cy-deuant écrites, fi ce n'elt feulement en la façon dont elles font icy expliquées, laquelle i'ay exprelTément changée pour m'accommoder à la diuerfité des efprits. Et ie confelTeray icy librement que cet argument elt tel, que ceux qui ne fe rellbuuiendront pas de toutes les chofes qui feruent à fa demonltration, le prendront aifement pour vn Sophifme ; & que cela m'a fait douter au commencement fi ie m'en deuois feruir, de peur de donner occafion à ceux qui ne le comprendront pas, de fe deffier aulFi des autres. Mais pource qu'il n'y a que deux vo3'es

153 par lefquelles on puiffe prouuer qu'il y a vn Dieu, fçauoir : | l'vne par fes effecls, & l'autre par fon eflence, ou fa nature mefme ; & que i'ay expliqué, autant qu'il m'a elle poflible, la première dans la troifiefme Méditation, i'ay creu qu'après cela ie ne deuois pas ob- mettre l'autre.

Pour ce qui regarde la diftindion formelle que ce tres-dode Théologien dit auoir prife de Scot, ie répons briêuement qu'elle ne diffère point de la modale, & qu'elle ne s'étend que fur les ellres incomplets, lefquels i'ay loigneufement diflinguez de ceux qui font complets; & qu'à la vérité elle fuftit pour faire qu'vne chofe foit

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