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4^4 Vie de Descartes.

distraire sa malade et prévenir l'ennui, lui écrivit, tous les quinze jours, des lettres sur la morale, et qu'elle y répondit. Nous avons six lettres de Descartes, du 21 juillet au 6 octobre, et même sept, en comptant celle du 3 novembre 1645. De concert avec Elisabeth, il avait choisi pour ces entretiens, qui ne devaient être qu'un divertissement et comme un bon usage philosophique de la maladie, le petit traité de Sénèque, de Vitâ Beatâ.

Mais Descartes n'était pas homme à suivre servilement un texte, et son esprit répugnait à bien entrer dans une pensée qui n'était pas la sienne. Après avoir lu le titre d'un ouvrage, il commençait toujours par rechercher ce que l'auteur avait pu dire, et il trouvait, naturellement, ce que lui-même aurait dit à sa place. Ainsi Sénèque s'attaque d'abord à Epicure. Notre philosophe en prend occasion de dire ce qu'il pense des princi- pales définitions que les Anciens nous ont laissées du souverain bien. Il les réduit à trois : celle d'Aristote, qu'il écarte, et celles d'Epicure et de Zenon, ou des Epicuriens et des Stoïciens, qu'il prétend réconcilier . Selon Aristote, en eflPet, le souverain bien se compose de toutes les perfections dont la nature humaine est capable, tant celles du corps que de l'esprit. Mais ce qui intéresse chacun, c'est de savoir de quel bien lui-même est capable en particulier, celui-ci plus, celui-là moins, chacun selon sa capacité. Voici plusieurs vases, plus ou moins grands, et qui peuvent par conséquent contenir plus ou moins de liqueur : mais tous peuvent être remplis jusqu'aux bords, tous seront alors également pleins. Ainsi chacun de nous peut avoir comme sa plénitude de vertu, ce qui est le bien de Zenon, et avoir par suite tout le contentement d'esprit, toute la joie, qui accompagne la vertu, ce qui est le bien d'Epicure. Descartes ne pensait pas que ce philosophe eût recommandé la seule

a. Tome IV, p. 252-253, p. 263 (du 4 août), p. 268 [du 16 août), p. 271 (du 18 août), p. 278 (août), p. 280 [i^' sept.), p. 287 [i3 sept.), p. 290 (i5 sept.), p. 3oi {3o sept.), p. 304 (6 cet.), p. 320 [du 28 oct.), p. 33o (du 3 nov.).

b. Ibid., p. 275, 1. 22, à p. 277, 1. 14.

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