Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, XII.djvu/80

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comme un philosophe, ni même comme un physicien, du moins à l’ancienne mode, et pas davantage comme un pur mathématicien ; mais, et c’était là son originalité, il étudiait les mathématiques pour leurs applications à la physique, et d’autre part la physique pour la ramener aux mathématiques ; c’était un physicien-mathématicien et réciproquement, et Beeckman se flattait d’avoir justement cette même tournure d’esprit[1]. On peut dire que, de son côté, il devina Descartes. Le volumineux manuscrit qu’on a retrouvé à Middelbourg, révèle en lui un savant universel, d’ailleurs assez confus, comme Mersenne ; il y a noté, au jour le jour, tout ce qui lui paraissait digne d’être conservé pour son instruction. Or il ne pouvait pas savoir, en 1618-1619, que ce volontaire de vingt-deux à vingt-trois deviendrait plus tard un grand philosophe ; il ne le saura même pas en 1628-1629. Et cependant, il se remémore leurs entretiens, il les rédige aussitôt, il lui demande en communication ses écrits, quelques pages sur la chute des corps, sur l’équilibre des liqueurs, et sur ses inventions algébriques[2]. Il a le sentiment très net de se trouver en présence d’un esprit supérieur ; et ceci fait l’éloge de tous deux, de Beeckman autant que de Descartes lui-même.

Celui-ci quitta la Hollande en avril 169. Où alla-t-il ? S’il faut en croire ses propres déclarations et les lettres de Beeckman, il devait s’embarquer le 29 à Amsterdam pour Copenhague. De là il se serait rendu à Dantzig ; puis par la Pologne et la Hongrie, il aurait gagné l’Autriche et la Bohême[3].

  1. Tome X, p. 52 : Phyſico-Mathematici pauciſſimi.
  2. Ibid., p. 67-74, 75-78 et 154-156.
  3. Ibid., p. 162, l. 8-13. Lipstorp ne donne pas d’itinéraire, et parle assez confusément des pays visités :

    « …ſequentes annos variis peregrinationibus per Galliam, Belgium, Daniam, Germaniam, Italiam impendens. « (Specimina, 1653, p. 76.)

    « Interim ille erumpentibus in flammam belli igniculis inter Bavarum & Fredericum Bohemiæ Regem antea gliſcentibus, quæ proh dolor ! totam Germaniam fermé depopulata eſt, noluit amplius militiam ſequi, ſed renunciatâ ſide militari ad ulteriores peregrinationes animum adjecit, perque totam ſuperiorem Germaniam ad plagas Borealiores