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le p’tit gars du colon

sonnette, vers le bois immense par où s’en revenait — ils l’espéraient du moins — leur pauvre papa, de longues ténèbres flottaient.

Si noires, ces ténèbres, sans une étoile et sans lune, parce que des nuages pleins de neige et de pluie, menaces d’avril, cachaient le ciel, tellement noires, que, prenant un fanal, Aimé déclara soudain :

— Moi, je vais chercher papa ; c’est sûr qu’il ne peut plus voir son chemin.

Il sortit ; Théodule le suivit.

La porte restait entrebâillée : brusquement le vent la ferma.

Petit Eugène et François en eurent peur, une peur d’enfant, ridicule mais réelle ; et cette peur une fois entrée ne les quitta plus… Le moindre bruit les énervait.

Eugène pleura ; François prit son chapelet. Des ave, récités par leurs deux voix tremblantes, montèrent, de cet abandon, vers le ciel… l’autre ciel, très clair, par-dessus l’horizon noir.

Dans l’abatis sombre où se dressent les souches, où s’enchevêtrent les branches coupées, où ferment tous sentiers les têtes abandonnées des grands arbres disparus, deux garçonnets cherchent leur papa.

Ils appellent ; ils agitent leur fanal pour que son vague reflet le guide ; ils ne se parlent plus : ils