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autour d’un berceau

les deux garçonnets dormant ferme dans leur commune couche de mérisier.

— Petits ! petits !

Il tâchait d’assourdir sa rude voix pour la mère qui reposait tout près, sur le haut lit.

Mais elle ne dormait pas.

Elle-même avait dit à son mari :

— Va ; qu’ils viennent l’embrasser.

Et les deux endormis, sans rien soupçonner de la joie nouvelle, se frottaient longuement les paupières toutes rougies et closes à demi. Quatre poings vigoureux, fiers petits bouts d’homme, passaient sur deux paires d’yeux qui prétendaient toujours ne pas s’ouvrir.

Le père en avait pitié ; il le reprochait à la mère :

— Un crime : faire lever nos innocents… ce qu’ils dorment de franc cœur !

— Non, non, François ; qu’ils viennent donc : le « nichouet » les appelle…

— Ah ! ça, tais-toi ; tais-toi, la mère ! fit l’homme exultant ; le nichouet ! parle-t-il seulement ? c’est-il vrai qu’il les appelle ?…

Il se penchait sur le berceau, caressait maladroitement le marmot minuscule de sa bonne grosse main de manieur de hache et de charrue ; caressait et badinait :

— Parle-t-il, le nichouet gentil ? sait-il crier, ce petit Gaudreau-là ?