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DERNIÈRES INSTRUCTIONS.

tresse. Dans la lettre suivante, la première qui soit datée (6 décembre), il apprend à Olympe que leur entrevue a été découverte. Est-ce de ce second rendez-vous qu’il entend parler ? Ou bien est-il tout simplement question de la visite travestie de sa Pimpette ? Nous penchons d’autant plus pour cette dernière hypothèse, qu’il s’écrie : « Dieu veuille encore que notre monstre aux cent yeux ne soit pas instruit de votre déguisement ! » En tout cas, ils se sont vus tout ce qu’ils se verront ; Arouet ne conserve pas à cet égard la moindre espérance, et s’efforce même de faire comprendre à son amie que ce serait achever de tout gâter que de hasarder dans de telles conditions une nouvelle rencontre. Après tout, si elle a du courage, si son amour ne faiblit pas, leur séparation sera courte, et ils ne tarderont pas à être réunis. En attendant, il lui écrira tous les ordinaires « à l’adresse de madame Santoc de Maisan. » Ses lettres à elle devront porter la suscription suivante : « À M. Arouet, le cadet, chez M. Arouet, trésorier à la chambre des comptes, cour du Palais, à Paris. » Moins résignée, Pimpette était décidée à tout tenter pour conjurer leur sort. Elle ira trouver l’ambassadeur, se jeter à ses pieds, le prier de les protéger contre le despotisme d’une mère indigne. Son amant, épouvanté, lui écrit de n’en rien faire, et ne lui donne que de trop bonnes raisons : « Quoi ! vous voulez parler à M. L*** ? Eh ! ne savez-vous pas que ce qu’il craint le plus, c’est de paraître favoriser notre retraite ? Il craint votre mère, il veut ménager les Excellences : vous devez vous-même craindre les uns et les autres, et ne point vous exposer, d’un côté, à être enfermée, et de l’autre, à recevoir un