Page:Desportes - Premières œuvres (éd. 1600) III - Cleonice. Dernières Amours.djvu/48

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  CLEONICE,  



LXX.


Vous m’avez tant appris à languir miserable,
Je suis, vos courroux si Cort àceoustumé,
Que, quand aucunes fois vous m’estes ravOl’able,
Je ne puis Rl’asseurer d’eetre de vous aimé.

lion cœur tremble tousjoun, bien qu’il soit enftamé
Et qu’il brûle en byver d’une ardeur incroyable ;
lia Co)’, eomme mon mal, en tous tans est durable,
lais des ailes d’Amour mon bien est emplumé.

Les heures sans vous voir me sout longues annt~s,
I.es ans que je vous voy me sont courtes journées,
Prez et loin toutesfois je meurs d’affection.

Je pleure et suis contant, je m’asseure et soupu’e,
Ne sçacbant que je veux, je sça)’ que je desire,
Et l’heur comme renDU} me donne passion.


LXXI.


Se fascher des propos d’un amant courroucé,
Aqui l’aooez du mal rait tenir ce langage ;
Et prendre garde tlu} comme s’il estoit sage,
Monstre que vostre esprit d’amour n’est point blessé.

Las ! nostre egal desir en vous estant cessé,
Tousjours plus ardamment me devore et saccage ;
Et c’est ce qUi m’affole et me comble de rage
De "oir vostre cœur libre et ]e mien enlaçé.

Encore, au lieu de m’estre et douce et salutaire,
Vous mettez sans pitié le feu dans mon ulcere,
Et oontre un furieux vous entrez en courroux,

Las ! par trop vous aimer j’ay cette frenaisic ;
Tousjours l’excez d’amour se change eu jalousie.
Quand j’aime tiedement, je ne suis point jaloux.