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LIVRE V


LES POÈTES


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Les tendresses de Victor Hugo pour les sonorités de la forme ont amené ses disciples au pur travail du rhythme et au mépris de l’idée. Mais des Bousingots de 1830 aux Impassibles de 1865, on compte bien des étapes.

Théophile Gautier d’abord donne à la forme romantique une solidité marmoréenne ; sa prose et ses vers ont les grands plis, la dureté éclatante d’un paros taillé par une main grecque. Les allures tourmentées de l’âge précédent se classifient et s’immobilisent. Il y a du Gœthe dans Théophile Gautier ; il prône l’impassibilité artistique, substitue le culte de la couleur et de la ligne à la confusion grandiose de l’époque lyrique. La poésie rejette l’inspiration des Lamartine et des Musset, peu soucieux de grammaire et attendant le souffle divin pour chanter aux étoiles ; l’art, toujours maître de lui, sera l’initiateur des générations nouvelles. À l’ivresse des enthousiastes succède le calcul des raffinés ; le lyrisme gèle. La poésie française offre alors la