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égoïste d’élégiaque, mais un amour naïf d’homme simple ; il adore sa fille et le lui montre par mille câlineries, mais vraiment il est trop bête lorsque, dans son hébétude suprême, il dit à Rodolphe, après boire : « Je ne vous en veux pas. »

Ses héros en pleine lumière, Flaubert n’a pas négligé les personnages accessoires. Les lointains sont aussi étudiés que les premiers plans.

Une difficulté, que le portrait de ces acteurs secondaires. Le médecin etsa femme ne devaient pas trancher par leur vérité au milieu d’êtres artificiels. Imagine-t-on deux créatures vivantes parmi des marionnettes ?

Ici le romancier n’a écouté que la logique. Charles est officier de santé dans un bourg. Quelles sont les notabilités d’un bourg ? Le maire, l’instituteur, le curé, le percepteur, le pharmacien, etc. Mais le médecin a plus de rapports, par la nature même de ses fonctions, avec le pharmacien et le curé qu’avec tous les autres. Condamnant la multiplicité des personnages qui auraient détourné l’attention du lecteur de la psychologie des Bovary, Flaubert a négligé presque entièrement le maire, l’instituteur et le notaire pour s’attacher uniquement aux collaborateurs du médecin. Il utilise ses souvenirs. Si même il a fait intervenir assez fréquemment le percepteur Binet, c’est sans doute pour mettre à profit un type plus que pour combler un vide.

Les amusants bonshommes ! Comme ils sont vrais !

S’il vous est donné de visiter l’intéressante bourgade d’Yonville, ne manquez pas d’admirer les bocaux du pharmacien, et tâchez d’apercevoir sa calotte à travers les vitrines. Il pile sans doute quelque drogue, en compagnie de son fils Napoléon, car Homais ne peut mourir ; il est éternel comme la bêtise humaine. Radical