Aller au contenu

Page:Desrosiers - Iroquoisie, tome 1 (1534-1646), 1947.djvu/144

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
146
IROQUOISIE

qui pullule d’animaux à fourrures, où il est dangereux, mais non impossible de s’aventurer ; à leur frontière du nord s’échelonnent jusqu’à la baie d’Hudson, des tribus de même sang, mais timides, qui attendent des intermédiaires et les accepteront pour peu qu’on leur offre des articles de traite.

Malgré tout ce que l’on dit, il est fort difficile de se prononcer sur la situation exacte de l’Iroquoisie en 1635. Ce pays a connu la petite traite de 1615 à 1618 environ ; puis une traite un peu plus considérable de 1624 à 1626. À partir de cette année, et surtout de 1628, il s’est lancé dans la grande traite ; le nombre des fourrures reçues à Fort Orange a augmenté par sauts et par bonds. Or, l’Iroquoisie, avec ses montagnes, ses belles forêts, ses hauts plateaux, ne semble pas aujourd’hui un habitat propice pour le castor. D’après certains observateurs, elle ne peut jamais en avoir abrité un grand nombre. Aussi, une fois la politique du commerce restreint, préconisé par Rensselaer, abandonné par tout le monde, le gibier de l’Iroquoisie ne pouvait durer bien longtemps. Et les tribus qui en manqueraient les premières, seraient évidemment celles qui seraient les plus rapprochés de la factorerie, et qui pourraient y aller facilement, comme les Agniers, les Onneyouts. Mais les tribus iroquoises, le jour ou le castor serait pratiquement exterminé chez elles, se trouveraient en face d’un problème difficile. Pour elles aussi, il y aurait en premier lieu la zone neutre ; mais à l’est, au sud, au nord, à l’ouest aucun espoir de s’en procurer par des moyens pacifiques.

Ainsi commence à se développer en 1635, une situation tragique autant pour les tribus indiennes que pour les colonies européennes. La frontière de la carte des fourrures recule à l’intérieur du pays par suite de l’extermination du gibier ; les peuples sauvages qui se trouvent en dehors de cette ligne manqueront de pelleteries ; alors elles ne pourront plus obtenir des factoreries les marchandises européennes dont elles ont pris l’habitude ; leur civilisation devra rétrograder ; et leurs forces militaires vis-à-vis des