Page:Desrosiers - Iroquoisie, tome 1 (1534-1646), 1947.djvu/21

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
23
IROQUOISIE

observateur parmi des gens qui sont de vieux coloniaux et connaissent déjà le Canada.

Le lendemain de son arrivée, le 28 mai, Champlain part de Tadoussac en compagnie de Pont-Gravé et de deux Indiens que celui-ci ramène de France ; il traverse l’embouchure du Saguenay et il descend à la Pointe-aux-Alouettes. Il se rend tout de suite à la cabane d’un grand chef algonquin, Anadabijou. Les Français découvrent ce personnage en plein festin, au milieu d’une compagnie de quatre-vingts à cent guerriers. Ils se trouvent bientôt assis par terre à la mode indienne « et tous les sauvages arrangés les uns auprès des autres des deux côtés de la dite cabane ».

Un conseil indien se tient aussitôt. Champlain observe avec curiosité les hommes néolithiques en face desquels il est subitement placé. Il note leurs cérémonies. L’un des Indiens qui reviennent de France, se lève et parle le premier. Il décrit longuement à ses auditeurs le pays qu’il a visité. Enfin, il raconte une entrevue qu’il a eue avec le roi, Henri IV ; et, poursuit l’orateur, celui-ci voulait que tous les Algonquins « s’assurassent que sa dite Majesté leur voulait du bien, et désirait peupler leur terre, et faire paix avec leurs ennemis (qui sont les Iroquois), ou leur envoyer des forces pour les vaincre »[1].

Le calumet circule ; chacun pétune ; Champlain et Pont-Gravé inhalent à leur tour des bouffées de fumée. À peine descendu sur le sol canadien, le premier assiste donc à une discussion sur l’alliance des Français et des Algonquins contre les Iroquois. Il apprend que le Roi est déjà saisi de cette affaire et même qu’il a posé ses termes. Il veut, par exemple, établir des colonies en Nouvelle-France ; il assure les Algonquins de son amitié ; il sait qu’une guerre sévit entre ces derniers et les Iroquois. Il ménagera la paix entre eux si c’est possible ; sinon il accordera son assistance militaire aux Algonquins.

L’affaire est évidemment engagée depuis un certain temps et elle a des racines dans le passé. Henri IV n’a pas parlé ainsi sans avoir été mis d’abord au courant des faits canadiens. Des coloniaux, Chauvin,

  1. Œuvres de Champlain, édition Champlain, v. 1, p. 100.