Aller au contenu

Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, troisième série, 1916.djvu/68

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

la plainte ni le murmure. — Elle ne semblait vivre que pour les autres.

Que les vivants sont égoïstes et oublieux ! Je le constatais avec une tristesse navrée en comptant toutes ces cartes, tous ces « Souvenez-vous » si nécessaires et qui ne suffisent pas hélas à préserver de l’oubli les pauvres morts.

Je me rappelais les foules qui se pressent dans les chambres mortuaires, les masses de fleurs, les centaines de messes, les regrets et les larmes sincères, la tristesse douloureuse des enterrements, les retours désolés du cimetière quand tout est fini !

Tout est fini, bien plus que nous ne le pensons dans les jours de deuil… la vie recommence pendant que les morts dorment, et elle s’empare de nos vies, de nos cœurs, et peu à peu les vides sont comblés, et les chères amitiés s’effacent et sont à peine distinctes dans le brouillard du passé…

Il faut peut-être qu’il en soit ainsi, puisqu’il faut vivre et que pour vivre bien il faut aimer la vie. Et comment pourrions-nous aimer la vie si nous vivions tellement avec le souvenir des morts que le commerce des vivants nous serait importun ?

En reprenant contact avec ces amis d’autrefois je n’y ai trouvé que de la douceur. Ils savent tout, maintenant, et ils nous comprennent mieux que nous ne le faisons nous-mêmes.

Je ne conçois pas qu’on puisse nier l’immortalité des âmes. Il me semble impossi-