Page:Deulin - Les Contes de ma mère l'Oye avant Perrault.djvu/68

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Ici, c’est l’esprit qu’on met en jeu ; dans Griselidis, c’est le cœur. Au lieu d’une épreuve intellectuelle avant le mariage, nous avons après des épreuves morales. Dans les deux cas, le caractère du mari est imposé par l’essence même du sujet. Fantasque d’un côté, barbare de l’autre, il faut le subir sans chercher à l’expliquer [1].

On a pourtant inventé un moyen, de le rendre moins odieux et plus facile à comprendre. Depuis le mystère qu’un anonyme a composé en 1395 sous le titre d’Histoire de Griselidis, cette charmante donnée a souvent été portée sur le théâtre ; jamais d’une façon aussi ingénieuse qu’en un drame que M. Munck Bellinghausen a fait jouer à Vienne en 1834.

La Griselidis allemande est devenue la femme de Percival, un chevalier de la Table-Ronde qui, ayant aimé la reine Ginevra, l’a quittée parce qu’il la trouvait trop coquette et trop orgueilleuse. Un jour que celle-ci le raille de ce qu’il a épousé la fille d’un charbonnier, il répond que, si la vertu réglait les rangs en ce monde, Griselidis serait sur le trône et la reine à ses pieds. Ginevra propose les trois épreuves légendaires et déclare que, si Griselidis y résiste, elle s’agenouillera devant la paysanne.

Percival a l’âme déchirée par les tortures qu’il

  1. i. Comparer aussi Griselidis avec la Pucelle de RoussilIon. Décaméron, 3e journée, 9e nouvelle.