Page:Dick - L'enfant mystérieux, Tome I, 1890.djvu/121

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pour le milieu où elle était appelée à vivre.

D’ailleurs il n’est pas bon, en thèse générale, que les femmes en sachent trop long : elles perdent en qualités pratiques ce qu’elles gagnent en science.

La fille adoptive de Pierre Bouet n’eut pas à éviter cet écueil, car elle aimait d’instinct la vie simple des champs, et ce fut avec un contentement sincère qu’elle reprit sa place au foyer de la famille.

Depuis lors, c’est-à-dire depuis deux années environ, l’existence de la jeune fille est douce comme une idylle de Théocrite, heureuse comme celle des bergères chantées par les poètes. Quand vient le temps de la fenaison, elle jette sur sa chevelure blonde un ample chapeau de paille et suit les travailleurs aux champs. Là, pendant que les engagés abattent à grands coups de faux les foins mûrs, que son père étend et retourne le précieux fourrage, que la servante Joséphine, armée d’un râteau, réunit en longues rangées parallèles celui qui est assez sec, Anna se livre à de douces rêveries, mollement étendue sur le revers gazonné du ruisseau où chantent les eaux de drainage. Elle respire avec ivresse les