Page:Dick - L'enfant mystérieux, Tome I, 1890.djvu/64

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

toine, pris de la fièvre du mouvement, a voulu faire son petit voyage aux États-Unis et tâter de la vie des manufactures.

Il avait environ vingt-six ans quand cette terrible maladie de yankisme s’abattit sur ses épaules, – et des milliers de nos compatriotes savent par expérience qu’on ne résiste guère à une affection comme celle-là.

Il afferma donc son bien, vendit un clos pour se faire de l’argent de poche, et le voilà parti pour la grande République, cet Eldorado des jeunes gens à humeur vagabonde qui se figurent naïvement que la Fortune, chez l’étranger, est moins marâtre qu’au pays.

Antoine ne tarda pas à dégringoler du haut de ses illusions. Ce fut quand, après avoir épuisé sa première mise de fonds, il se trouva en face d’une cruelle nécessité : le travail. Jusque là, il avait cru vaguement qu’aux États-Unis l’argent se gagnait à estropier la langue anglaise et à respirer l’âcre fumée des usines. Aussi, la chûte fut-elle rude pour un garçon qui n’avait jamais fait autre chose, dans son pays, que se promener d’une paroisse à l’autre dans le cabriolet paternel et courir les veillées, à la recherche des jolies filles.