Page:Dickens - Barnabé Rudge, tome 2, Hachette, 1911.djvu/204

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CHAPITRE XXII.

Rompant le silence qu’ils avaient gardé jusque-là, ils se mirent à pousser un grand cri, aussitôt qu’ils se furent rangés devant la prison, et demandèrent à parler au gouverneur. Leur visite n’était pas tout à fait inattendue, car sa maison, qui se trouvait sur la rue, était fortement barricadée ; le guichet de la geôle était fermé, et on ne voyait personne aux grilles ni aux fenêtres. Avant qu’ils eussent répété plusieurs fois leur sommation, un homme apparut sur le toit de l’habitation du gouverneur, pour leur demander ce qu’ils voulaient.

Les uns disaient une chose, les autres une autre, la plupart ne faisaient que grogner et siffler. Comme il faisait déjà presque nuit, et que la maison était haute, il y avait dans la foule un grand nombre de gens qui ne s’étaient pas même aperçus qu’il fût venu personne pour leur répondre, et qui continuaient leurs clameurs, jusqu’à ce que la nouvelle s’en fût répandue partout dans le rassemblement. Il s’écoula bien au moins dix minutes avant qu’on pût entendre une voix distincte, et, pendant ce temps-là, on voyait cette figure qui restait perchée là-haut, et dont la silhouette se détachait sur le fond brillant d’un ciel d’été, regardant en bas dans la rue où se passait la scène de trouble.

« N’êtes-vous pas, finit par crier Hugh, monsieur Akerman, le geôlier en chef de la prison ?

— Certainement, c’est lui, camarade, » lui dit Dennis à l’oreille.

Mais Hugh, sans faire attention à lui, voulait avoir la réponse de l’homme même.

« Oui, dit-il, c’est moi.

— Vous avez là, sous votre garde, maître Akerman, quelques-uns de mes amis.

— J’ai là beaucoup de monde sous ma garde ; » et en même temps il jetait en bas un coup d’œil dans l’intérieur de la prison.