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« Vous vous portez bien, monsieur Rouncewell ? j’en suis enchanté ; asseyez-vous. Milady a quelque chose à vous communiquer, monsieur, ajoute sir Leicester, qui d’un geste solennel passe adroitement la parole à sa dame.

— Je serai toujours heureux d’écouter ce que lady Dedlock me fera l’honneur de me dire, » répond le maître de forges.

L’impression que lui fait éprouver milady est moins agréable que la dernière fois qu’il l’a vue ; un air de hauteur indicible répand autour d’elle une atmosphère glacée, et rien dans son attitude ne provoque la franchise.

« Pourrais-je vous demander, monsieur, s’il a été question entre vous et votre fils du caprice qu’il a eu autrefois ? »

Milady ne prend pas même la peine de regarder le maître de forges.

« Si je m’en souviens bien, lady Dedlock, je vous ai dit, lorsque j’eus l’honneur de vous voir, que je conseillerais sérieusement à mon fils d’oublier ce… caprice.

— L’avez-vous fait ?

— Sans doute, milady. »

Sir Leicester incline la tête en signe d’approbation ; le gentleman de forges était tenu de le faire, puisqu’il avait dit qu’il le ferait ; il ne devait y avoir, sous ce rapport, nulle différence entre les vils métaux et le métal précieux de l’aristocratie.

« Et a-t-il fait ce que vous lui avez dit ?

— Je ne puis rien vous répondre de précis à cet égard, lady Dedlock ; mais je ne le suppose pas ; les gens de notre condition appuient en général leurs… caprices sur des motifs qui les empêchent d’y renoncer aisément : il est dans notre nature d’être sérieux et de persévérer dans nos désirs. »

Le baronnet soupçonne quelque intention Wat-Tylérienne cachée sous ces paroles et s’irrite intérieurement ; M. Rouncewell est d’une extrême politesse ; mais il est évident qu’il mesure son langage sur la réception qui lui est faite.

« Je vous le demande, continue milady, parce que j’ai songé à cette affaire qui m’ennuie énormément.

— J’en suis désolé, milady.

— Je partage complétement l’opinion de sir Leicester (le baronnet est flatté), et si vous ne pouvez pas m’assurer que le caprice de votre fils n’existe plus, il vaut mieux pour cette jeune fille qu’elle s’en aille.

— Excusez-moi, milady, mais ce serait faire injure à cette jeune personne, qui ne l’a pas méritée, fait gravement observer le baronnet ; une jeune fille, poursuit-il en étendant la main