Page:Dickens - Bleak-House, tome 2.djvu/305

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Mais, vous avez été bon soldat, fidèle à votre drapeau, n’est-ce pas ?

— Quant à cela, sir Leicester, j’ai rempli mon devoir, et n’ai jamais manqué à la consigne ; c’était bien le moins que je pusse faire.

— Vous me retrouvez bien souffrant, Georges, reprend le baronnet dont le regard se fixe avec plaisir sur le visage du maître d’armes.

— J’en suis profondément affligé, sir Leicester.

— Je n’en doute pas, Georges ; en surcroît de mon ancienne maladie, j’ai été pris subitement d’une attaque assez grave ; comme une paralysie… »

Georges fait un signe respectueux et sympathique ; les années qu’ils ont passées ensemble à Chesney-Wold, à une époque où l’un était presque un enfant et l’autre encore un jeune homme, se dressent devant eux et les attendrissent l’un et l’autre.

Sir Leicester évidemment a quelque chose à dire, et fait un effort pour se relever davantage ; le maître d’armes le prend de nouveau dans ses bras, et le met dans la position qu’il désire.

« Merci, Georges, vous me devinez à merveille ; vous m’êtes un autre moi-même. Vous rappelez-vous qu’autrefois vous portiez mon fusil de rechange quand vous étiez enfant et que j’allais à la chasse ? Je vous reconnais bien. Au milieu des circonstances étranges où je me trouve, je ne vous en reconnais pas moins, comme si c’était hier. »

Le sergent a posé sur son épaule le bras de sir Leicester, et le baronnet l’y laisse longtemps appuyé, avant de songer à le retirer.

« Je voulais ajouter, relativement à cette attaque, reprend sir Leicester, qu’elle s’est malheureusement produite en même temps qu’un léger malentendu entre moi et milady ; je ne veux pas dire qu’il y ait eu entre nous la moindre discussion, au contraire ; c’est tout simplement à propos d’une circonstance peu importante qu’elle a cru devoir faire ce petit voyage, et cela me prive de l’avoir auprès de moi ; mais j’ai la certitude qu’elle va bientôt revenir ; entendez-vous ce que je dis, Volumnia ? je ne prononce pas les mots aussi facilement que je voudrais. »

Volumnia l’entend à merveille ; et à vrai dire il s’exprime beaucoup plus distinctement qu’on ne l’aurait cru possible quelques instants auparavant ; sa figure trahit l’effort qu’il fait pour être intelligible, et l’importance du but qu’il veut atteindre peut seule lui faire vaincre la difficulté qu’il éprouve.