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Mais à part ces festivals exceptionnels, le Lincolnshire n’offre à la cousine du baronnet qu’un vaste manoir antique et solitaire, au milieu de grands arbres qui soupirent, se tordent les bras, courbent la tête, et, dans cette attitude désolée, jettent leurs larmes sur les vitraux assombris ; un pompeux labyrinthe, dont les propriétaires véritables sont maintenant une famille d’échos retentissants que le moindre son fait sortir de leurs sépulcres ; un dédale de corridors et d’escaliers où personne ne passe ; un désert où le peigne d’écaille qui, par hasard, tombe le soir sur le parquet, fait courir le bruit de sa chute à travers tout l’édifice et le renvoie jusqu’au faîte ; un lieu maudit où l’on a peur de rôder seul, où la cendre qui glisse du foyer arrache un cri de terreur à la nouvelle servante, qui, de frayeur en frayeur, tombe dans le marasme, donne congé et s’en va.

Tel est maintenant Chesney-Wold, presque entièrement abandonné au vide et aux ténèbres, presque aussi triste quand le soleil d’été brille que lorsque les nuages couvrent le ciel d’hiver. Plus de drapeau flottant pendant le jour, plus de rangées de fenêtres lumineuses étincelant dans la nuit, plus de famille, plus de visiteurs pour animer ces chambres glacées, plus de mouvement, plus de vie nulle part. La grandeur hautaine et l’orgueil même n’y frappent plus les yeux de l’étranger ; ils se sont retirés de l’antique domaine des Dedlock pour céder la place à un morne repos.


CHAPITRE XXXVII.

Fin de la narration d’Esther.

Il y a maintenant plus de sept années que je suis la maîtresse de Bleak-House. J’aurai bientôt fini les quelques lignes que j’ai encore à écrire, et alors il ne me restera plus qu’à me séparer de l’ami inconnu pour qui j’ai pris la plume ; mais je lui conserverai un affectueux souvenir, et j’espère que de son côté il ne m’oubliera pas.

Ils placèrent ma chère fille dans mes bras, et je passai de longues semaines sans la quitter une minute. Le petit enfant qu’elle attendait vint au monde avant que l’herbe fût poussée