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et se mit à causer avec Éva et moi, me faisant respirer les fleurs de temps en temps, ou les approchant de ma figure pour voir l’effet qu’elles produiraient dans mes cheveux. Enfin, comme elle allait partir, elle m’emmena dans ma chambre et attacha le bouquet à mon corsage.

« Pour moi ! m’écriai-je avec surprise.

— Mais oui, répondit-elle en m’embrassant ; quelqu’un les a laissées pour vous au moment de son départ.

— Quelqu’un… au moment de son départ ?

— Chez la pauvre miss Flite ; quelqu’un qui fut bien bon pour elle, et qui est parti pour rejoindre son vaisseau, il y a une heure à peine ; non, non, ne les ôtez pas ; laissez-les reposer là, dit-elle en les fixant avec soin. J’étais présente quand on les apporta chez miss Flite, et je crois bien que c’est pour qu’elles soient où je les ai mises qu’elles ont été laissées.

— Vraiment ! dit Éva en riant et en me prenant par la taille, ce bouquet ressemble-t-il à un présent d’amoureux ? Eh bien ! oui, dame Durden, tout à fait ! tout à fait ! »


CHAPITRE XVIII.

Lady Dedlock.

Il ne fut pas si aisé qu’on l’avait cru d’abord de faire entrer Richard dans l’étude de M. Kenge, pour y commencer une espèce de noviciat de la nouvelle carrière qu’il voulait entreprendre ; le principal obstacle était Richard lui-même. Dès qu’il lui fut possible de quitter M. Badger, son incertitude recommença ; il ne savait pas si réellement il faisait bien d’abandonner la médecine ; ce n’était pas une mauvaise profession ; il n’était pas bien sûr qu’il n’eût pas de goût pour elle, ni surtout qu’une autre lui plût davantage ; il fallait encore essayer. Il s’enferma donc pendant un mois avec quelques livres et quelques os, parut faire des progrès excessivement rapides, acquérir en peu de temps un grand fonds de connaissances ; puis son ardeur se refroidit peu à peu, s’éteignit complétement, et reprit plus vive que jamais. Enfin, ses oscillations entre le droit et la médecine durèrent si longtemps, que le milieu de l’été arriva avant qu’il eût quitté définitivement le docteur Badger pour entrer chez M. Kenge,